Témoignage de M. Philippe Reul, bénévole au Mundaneum

A l'occasion de la Journée Internationale des Archives 2014, Philippe Reul, bénévole au Centre d'archives du Mundaneum depuis deux ans, revient sur son expérience. 
 



"Le hasard y est pour beaucoup si quelques semaines après la retraite, mon attention a été attirée par un entrefilet dans le Bulletin de la Ville de Mons évoquant un appel au bénévolat du Mundaneum.

Rapidement, je me retrouvais, après les contacts préalables et les  petites formalités nécessaires, avec un premier carton rempli de journaux et de publications produits à différentes époques dans une petite ville française. L’objectif est de répertorier le contenu de ces très nombreux cartons en insérant les données dans un fichier (Excel ) qui permettra ultérieurement des recherches basées sur les  éléments encodés (coordonnées du carton, nom de la publication, lieu d’édition, date des exemplaires, langue utilisée,…).
 

" C’est incontestablement plus une impression  qu’une vérité historique mais oh combien passionnante. "

Dès les premiers jours, la crainte était la monotonie de la tâche. Très vite, au contraire, la diversité des publications et des périodes, les précautions à prendre devant certains exemplaires particulièrement fragiles ont rompu le rythme d’autant que chaque carton est différent du précédent. Inconsciemment environ deux siècles de notre Histoire se déroulaient tout-à-coup devant moi. Passer d’une feuille républicaine de 1848 à des échos des préparatifs de la guerre de 14-18 voire aux manifestations des années 1930, vous crée un film plus palpable qu’un documentaire aussi professionnel et exhaustif soit-il. Certes, le contenu de chaque carton ne permet pas une lecture scientifique de l’actualité proposée par une publication  mais sa manipulation suscite, quasi inconsciemment, un imaginaire dans lequel vous plongez dans l’histoire comme elle pourrait avoir été vécue. C’est incontestablement plus une impression  qu’une vérité historique mais oh combien passionnante.

Quels premiers enseignements tirer de ces deux années de « bénévolat » à temps très partiel, j’oserai dire de travail libre ne ressentant finalement d’autre obligation que celle de faire pour un mieux sans contrainte de temps et de rendement.

Tout d’abord, la multiplicité et la complexité de la presse au XIXe et au début du XXe siècle en France. Au lieu des grands groupes de presse d’aujourd’hui à diffusion nationale ou régionale,  chaque petite ville avait alors son voire ses quotidiens. A côté de ceux-ci, les périodiques les plus divers foisonnaient. Certains étaient centenaires, d’autres au berceau. Vue d’un rapide coup d’œil, la  qualité de la presse, hormis en ce qui concerne le papier ou les  photographies, n’apparait guère différente de celle d’aujourd’hui : un journal est toujours un journal. Certes, les publications étaient fort inégales, certains quotidiens étaient chétifs d’autres nettement moins, mais globalement les cartons répertoriés donnent l’image d’une grande continuité du moins à partir de la seconde moitié du XIXe.
Quant  au contenu, souvent à peine aperçu, essentiellement au niveau des grands titres, parce que ce n’est pas l’objet du travail, quelques thèmes d’époque interpellent, par exemple l’antisémitisme de certaines publications de la fin du XIXe siècle ou l’apparition tardive, à la même époque, de la question « sociale ». Jusqu’ici mes « dépouillements » ont porté essentiellement sur la province française, ce qui pourrait biaiser l’impression globale. Ces fardes font partie du vaste projet des initiateurs du Mundaneum. Dans certains cartons, il est émouvant de tenir en main des pièces, des enveloppes par exemple, adressées directement à MM. Otlet ou La Fontaine. Rien que pour la France, obtenir et puis assembler toutes ces publications a dû être une tâche colossale.

 

" Une belle entreprise. "

Finalement être bénévole au Mundaneum m’a fait connaître l’institution elle-même, ses objectifs, ses trésors,… C’est une expérience intéressante qui me convient particulièrement ayant toujours eu des hobbies à orientation historique voire des activités professionnelles portant sur des sujets qui remplissent fréquemment les colonnes de la presse. En clair, il y a moyen de profiter pleinement de sa retraite tout en participant, très modestement, à une belle « entreprise ». A côté du Google de papier, il pourrait y avoir un jour le papier dans Google lorsque la trace de toutes ces publications sera « enfichée ». "

 

Philippe Reul ; Bénévole au Mundaneum
Lundi 2 juin 2014